Les mises en chantier dans l’habitation chutent alors que les besoins augmentent

Mardi, 18 octobre, 2022
Pierre St-Arnaud, La Presse, La Presse Canadienne

Extrait(s) :

La crise du logement s’aggrave à la vitesse grand V au Québec alors que l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) rapporte des baisses importantes du nombre de mises en chantier d’unités d’habitation en septembre dernier.

L’APCHQ avait déjà lancé un signal d’alarme en juin dernier dans une analyse qui concluait à un manque de 100 000 logements au Québec, soit 58 000 maisons unifamiliales, 15 000 logements locatifs et 37 000 unités de logement social.

Or, voilà que l’APCHQ dénombre en septembre dernier une baisse de 30 % du nombre de maisons individuelles et de 31 % du nombre de logements collectifs mis en chantier par rapport à septembre 2021. Ces données, qui proviennent de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), font état de baisses dans cinq des six régions métropolitaines de la province, avec Gatineau au premier rang (-74 %), suivie de Trois-Rivières (-49 %), Sherbrooke (-42 %), Québec (-39 %) et Montréal (-27 %). Seule la région métropolitaine de Saguenay montre une hausse de 110 % des mises en chantier globales entre septembre 2021 et septembre 2022.

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« On s’en va dans la mauvaise direction, effectivement », affirme sans hésiter Paul Cardinal, directeur du service économique de l’APCHQ, dans un entretien avec La Presse Canadienne.

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Si le déficit de 100 000 unités était structurel, la diminution des mises en chantier qui va l’aggraver est conjoncturelle, conséquence directe de la hausse des taux d’intérêt qui a un effet domino sur toute la chaîne.

« Les taux d’intérêt font en sorte qu’il y a un ralentissement des ventes pour ce qui est des propriétaires-occupants, donc les copropriétés et les maisons unifamiliales, mais ça se répercute aussi sur le locatif : comme les coûts de financement sont plus élevés, la rentabilité n’est pas là pour certains projets. Pour qu’elle soit là, il faudrait augmenter les loyers de manière importante et il y a des promoteurs qui constatent que le marché n’est pas capable de prendre ces loyers-là », explique M. Cardinal.

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Parallèlement, ajoute Paul Cardinal, après le fort ralentissement dans l’accueil de travailleurs et étudiants étrangers causé par la pandémie, ceux-ci reviennent en grand nombre et sont, pour l’écrasante majorité, locataires. « Ce sont des résidents non permanents et il faut les loger quelque part. »

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D’ailleurs, la pénurie de main-d’œuvre touche aussi l’industrie de la construction et contribue au ralentissement. « Le manque de main-d’œuvre est un des facteurs qui fait qu’on a du mal à atteindre un rythme plus élevé de mises en chantier. Il y a encore aussi des problèmes d’approvisionnement, mais déjà en 2021, des promoteurs nous ont dit qu’ils avaient prévu prendre un peu moins de mandats en 2022 parce qu’ils ont eu de la difficulté à avoir le personnel requis pour compléter les projets qui avaient démarré. »

Le problème dérange au point d’amener les entrepreneurs à songer à de nouvelles solutions. « On serait prêts, dans le marché de la construction, à accueillir des travailleurs saisonniers, même si la construction c’est 12 mois par année. S’ils sont ici d’avril à octobre, par exemple, ils peuvent donner un coup de main. Ce serait bienvenu parce qu’on a vraiment besoin de main-d’œuvre sur les chantiers », estime M. Cardinal.