Immobilier : une bonne idée de dévoiler le contenu des offres d’achat?

Mardi, 3 mai, 2022
Kim Chabot, Radio-Canada

Extrait(s) :

Lorsque le secteur immobilier est en surchauffe, devrait-on rendre publiques les offres d’achat déposées?

Au Québec, la question a été posée lors d’une consultation lancée par le ministre des Finances Eric Girard l’an dernier. Pour l’instant, le ministère n’a rien proposé sur le sujet.

[...]

Stephen Moranis, ancien président de la Chambre immobilière de la région de Toronto, et Murtaza Haider, professeur en gestion immobilière à l’Université métropolitaine de Toronto, ont répondu aux questions du journaliste François Sanche de La facture.

Certains acheteurs surenchérissent, alors qu’ils avaient déjà la meilleure offre. Ils paient trop pour rien. Est-ce courant?

[...]

Stephen Moranis : Partout au pays, les agents doivent dire aux acheteurs combien il y a d’offres [...] C’est donc fort possible que vous fassiez une offre très généreuse puisqu’on vous a dit qu’il y avait, disons, cinq offres sur la table [...] Les autorités réglementaires devraient protéger ces acheteurs. Certes, la situation est favorable aux vendeurs, mais les vendeurs d’aujourd’hui seront les acheteurs de demain.

Je suppose que rendre les offres publiques n'éliminerait pas la surchauffe du jour au lendemain?

Murtaza Haider : Les prix montent quand la demande dépasse l’offre de maisons disponibles, et ce, peu importe si les offres se font à l’aveugle ou non. Par contre, on va constater des impacts à petite échelle. Si une propriété se vend 250 000 $ plus cher en raison d’une surenchère à l’aveugle, la valeur des maisons du voisinage va s’ajuster en fonction de cela. Les prix des autres inscriptions vont monter. Ils ne seront pas moins élevés parce qu’il n’y a pas assez de maisons à vendre. Donc, à l’échelle d’un quartier ou d’une rue, la surenchère à l’aveugle fait monter les prix si la première maison s’est vendue beaucoup trop cher.

Que répondez-vous à ceux qui croient que la divulgation des offres rendrait le processus plus complexe?

Murtaza Haider : Cette technologie existe déjà. Mais je pense qu’il y a une réticence de la part des législateurs. Les gouvernements devraient pouvoir nous dire si la surenchère à l’aveugle a un impact sur l’accès à la propriété, si cela contribue à la surchauffe, et pourtant ils n’ont pas cette information. Il n’est pas nécessaire de savoir qui a fait quelle offre [pour protéger les renseignements personnels des acheteurs, NDLR]. Par contre, nous devons savoir où se situe notre offre par rapport aux autres, ou de combien notre offre surpasse celle des autres.

[...]

Sommes-nous prêts à plus de transparence?

[...]

Stephen Moranis : [...] Présentement, le vendeur a l’avantage, et l’industrie de même que les autorités réglementaires encouragent et soutiennent ça. Je préconise la transparence pour ramener la confiance du consommateur envers les autorités réglementaires et l’industrie du courtage. Ce qui ne veut pas dire que ça va favoriser l’accès à la propriété. Les maisons sont peu abordables notamment parce qu’elles sont peu nombreuses sur le marché. Avec plus de transparence, certaines maisons pourraient même se vendre encore plus cher! Parce que les acheteurs auraient davantage confiance dans le système et seraient convaincus d’avoir été traités de façon équitable.

Que pensez-vous de la proposition ontarienne de permettre la divulgation des offres seulement si le vendeur est d’accord?

Stephen Moranis : Nous sommes rendus au-delà de rendre cette option volontaire. Ça devrait être obligatoire. Si les offres sont multiples, le processus devrait être ouvert et transparent afin que les gens puissent avoir confiance.