L’hypothèque légale pour des rénovations: un problème à régler

Mercredi, 16 novembre, 2022
Jean Sasseville, Les Affaires

Extrait(s) :

Un couple fait remplacer ses fenêtres et certaines sont mal installées. L’entrepreneur demande le paiement final et le couple exige la réparation des fenêtres défectueuses avant d’acquitter sa facture. Comme l’entrepreneur n’accepte pas de faire les réparations demandées, le couple refuse de payer.

L’entrepreneur envoie une mise en demeure informant le couple de son intention d’inscrire une hypothèque légale de la construction. Le couple pourrait contester devant les tribunaux. Parce que cette contestation peut coûter plus cher que le montant en cause, ils décident de ne plus retenir leur paiement. Ils devront ensuite engager un autre entrepreneur pour finaliser les travaux.

Une hypothèque légale en faveur des personnes ayant participé à la construction ou à la rénovation d’un immeuble permet de protéger les sommes qui leur sont dues pour les travaux effectués.

L’hypothèque légale de la construction prend rang avant toutes les autres hypothèques grevant votre propriété, sauf quelques exceptions. Dans certains cas, cette hypothèque peut mener à une vente en justice, pour que la dette soit remboursée.

L’hypothèque d’une institution financière prend rang derrière les hypothèques légales de la construction. L’institution financière peut considérer l’hypothèque légale comme une cause de défaut au prêt hypothécaire.

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Si les hypothèques légales pour les petits travaux sont interdites, les entrepreneurs voudront probablement obtenir d’autres garanties. Sinon, ils devront augmenter leurs prix vu le risque accru de mauvaises créances.

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« Les hypothèques légales de la construction sont présentes dans de très nombreuses ventes immobilières. Invisibles, dormantes, insoupçonnées, elles peuvent être bien dangereuses », mentionne Me Isabelle Sirois, avocate spécialisée en droit immobilier.

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L’Association des consommateurs pour la qualité dans la construction (ACQC) propose:

  • D’interdire l’inscription d’une hypothèque légale de la construction pour une créance de moins de 15 000 $, le maximum admissible aux petites créances;
  • Qu’une hypothèque légale ne permette plus la saisie d’un immeuble servant de résidence principale pour garantir le paiement d’une créance inférieure à 20 000 $;
  • Qu’une hypothèque légale soit présumée abusive lorsque les travaux effectués par l’entrepreneur comportent des vices, des malfaçons ou ne respectent pas les règles de l’art.

 

« Il n’est pas justifié que l’industrie de la construction ait cet avantage alors que toutes les autres entreprises doivent se tourner vers les tribunaux pour récupérer certaines mauvaises créances », souligne Marc-André Harnois, directeur général de l’ACQC.

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« Est-ce que je paye 10 000 $ en frais d’avocat pour ne pas payer 5000 $ ou je cède devant l’entrepreneur? Le problème est qu’il est trop facile pour l’entrepreneur d’inscrire une hypothèque légale et qu’il est compliqué, long et coûteux pour un consommateur de s’en libérer », soulève Marc-André Harnois.

En 2018, Simon Jolin-Barrette s’est engagé, au nom de la CAQ, à revoir la législation pour mieux protéger les consommateurs. En 2021, il a mandaté la firme Raymond Chabot Grant Thornton pour analyser les impacts d’une abolition de cet outil pour les petits travaux sur les entreprises du secteur de la construction. Il y a eu une levée de boucliers de l’industrie.