L’hypothèque légale sous la loupe

Jeudi, 6 avril, 2023
Mariane Guay, Le Quotidien

Extrait(s) :

L’Association des consommateurs pour la qualité dans la construction (ACQC) dénonce la réglementation actuelle entourant l’hypothèque légale et réclame un changement lorsque les travaux sont de l’ordre des petites créances. Le directeur général de l’ACQC, Marc-André Harnois, explique que la problématique est que peu importe la valeur des travaux, le dossier est directement envoyé à la Cour du Québec ou à la Cour supérieure.

« C’est dans ces contextes-là que l’on dénonce. Aussitôt que la créance est de moins de 15 000$, on prend un dossier qui normalement serait allé à la Cour des petites créances et on l’envoie en Cour supérieure, mais là ce n’est pas les mêmes coûts pour se défendre pour le consommateur. Ça lui coûte un avocat et c’est beaucoup plus de démarches s’il doit se défendre en Cour supérieure qu’en Cour des petites créances », observe-t-il.

En 2021, l’ACQC avait publié le document Analyse des données sur l’hypothèque légale de la construction et les résultats concordaient avec ce qu’elle dénonçait. Parmi les données recueillies entre janvier 2015 et février 2020, on constate qu’environ 3000 hypothèques légales ont été publiées chaque année. Dans la période ciblée, 26% des hypothèques légales ont été publiées pour des montants de 15 000$ et moins. En ne comptant que le secteur des consommateurs, on indique que c’est 42 % des hypothèques légales qui sont inscrites pour un montant de 15 000 $ et moins.

Dans ces cas, il soutient que certains entrepreneurs peuvent profiter de cette lacune en défaveur des propriétaires.

« Imaginons que vous engagez un entrepreneur qui vient travailler chez vous et que vous vous rendez compte, à la fin des travaux, qu’il y a des choses qui ont mal été faites. L’entrepreneur veut se faire payer, mais vous ne voulez pas payer la totalité, car il reste des choses à corriger, puis il vous dit que si vous ne payez pas il va mettre l’hypothèque légale. Tu te retrouves alors avec un litige qui aurait pu se régler à la Cour des petites créances, mais il y a une hypothèque légale sur la maison. Il faudra donc aller à la Cour supérieure pour la faire radier. L’entrepreneur va se servir de ça pour se faire payer, qu’il ait raison ou pas, parce que ce que faire appel à un avocat va être en général plus coûteux que ce que lui te réclame », révèle M. Harnois.

Le directeur général de l’ACQC attend toujours que des changements soient mis en place afin de s’assurer que les propriétaires ne se retrouvent pas coincés avec ce qu’il appelle un entrepreneur « de mauvaise foi », mais que les entrepreneurs « de bonne foi » se fassent payer. « Le ministère de la Justice a un beau casse-tête », estime ce dernier.