Rénovations résidentielles: des consommateurs se font menacer à coups d'hypothèques légales

Vendredi, 18 mars, 2022
Richard Olivier, Journal de Québec

Extrait(s) :

Des entrepreneurs agressifs utilisent de plus en plus les hypothèques légales de construction dans le domaine de la rénovation résidentielle, au grand désespoir de petits propriétaires.

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La loi permet aux entrepreneurs d’obtenir une hypothèque légale de construction sur un immeuble lorsqu’ils estiment ne pas avoir été payés pour des travaux qu’ils ont effectués.

Selon l’Association des consommateurs pour la qualité dans la construction (ACQC), ces hypothèques inscrites sur les bâtiments neufs sont en voie de disparition tandis que la tendance est à la hausse pour la rénovation. 

« Dans la moitié des cas [pour le secteur résidentiel], c’est pour des litiges de moins de 20 000 $. C’est ça qu’on dénonce », explique Marc-André Harnois, directeur général de l’ACQC.  

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L’ACQC fait pression sur Québec afin de modifier la loi. Elle demande à Québec d’interdire aux entrepreneurs l’enregistrement d’une hypothèque légale dans les litiges de 15 000 $ et moins.  

« Le problème, explique Marc-André Harnois, c’est que l’hypothèque est facile à inscrire au registre foncier. [...] Le registre ne va pas faire plus de recherche qu’il faut en se disant que le consommateur peut toujours la contester à la cour. » 

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Maxime Jodoin s’est fait asséner une hypothèque légale de la construction. Le litige de 17 000 $ porte sur des travaux d’excavation dans le sous-sol de son triplex. Il a été forcé d’embaucher un avocat, son prêteur hypothécaire lui a tourné le dos et il a dû remplir sa carte de crédit et sa marge de crédit au maximum.

M. Harnois résume ainsi le dilemme de plusieurs proprios : « Est-ce que je paye 10 000 $ d’avocat pour ne pas payer 5000 $ ou je cède devant l’entrepreneur ? » 

Monsieur Jodoin a reçu son jugement l’été dernier, trois ans après les travaux. 

La Cour des petites créances l’a condamné à rembourser 14 000 $ à CanExpert. 

« Selon le juge, vu que c’est [l’entrepreneur] l’expert, c’est lui qui peut évaluer le montant des travaux exécutés », déplore-t-il. 

UNE HYPOTHÈQUE LÉGALE DE LA CONSTRUCTION, QU’EST-CE QUE C’EST ?   

«L’hypothèque légale de la construction est un droit hypothécaire accordé à l’industrie de la construction pour la protéger contre les défauts de paiement. Ultimement, il peut permettre à ceux qui ont participé à des travaux sur un bâtiment de faire vendre ledit bâtiment en justice pour être payés. Il s’agit d’un droit exceptionnel accordé exclusivement à l’industrie de la construction et qui n’a aucun comparable dans toute autre industrie au Québec » , explique l’ACQC sur son site internet.