Projet de recherche de 2012-2013 qui porte un éclairage sur l'utilisation que font les consommateurs des Cours des petites créances dans tout le Canada lorsqu'ils sont engagés dans un litige de construction.
Version française
ISBN 978-2-922677-15-7 (Relié)
ISBN 978-2-922677-16-4 (PDF)
Version anglaise
ISBN 978-2-922677-17-1 (Print)
ISBN 978-2-922677-18-8 (PDF)
Sommaire exécutif
Les problèmes de construction et de rénovation domiciliaires constituent l’une des plus importantes sources de réclamations des consommateurs au Canada. Il n’est donc pas étonnant de constater que les litiges dans ce domaine comptent également pour une part importante des différends entendus par les Cours des petites créances. Pensées spécialement pour traiter les problèmes de la vie courante engageant des sommes financières relativement modestes, ces cours encouragent les citoyens à agir seuls tout au long de la procédure. Pour qu’un tel système fonctionne, il est essentiel de mettre à la disposition des citoyens tous les outils juridiques dont ils pourraient avoir besoin, qu’il s’agisse du droit applicable ou des règles de procédure à suivre.
De par sa vocation, l’Association des consommateurs pour la qualité dans la construction est particulièrement sensible à ces questions. Cette étude propose de recenser les résultats d’une recherche menée sur l’utilisation de la Cour des petites créances par les consommateurs aux prises avec des litiges de construction ou de rénovation domiciliaire. En adoptant une approche tournée vers le consommateur, cette recherche s’efforce d’apporter des éléments de réponse aux questions suivantes :
- Comment fonctionnent les Cours des petites créances dans les différentes provinces canadiennes ?
- Quelles sont les règles juridiques qui s’appliquent aux litiges de construction ou de rénovation que les consommateurs peuvent mobiliser pour faire valoir leurs droits devant ces cours ?
- Quelles sont les informations qui leur sont transmises pour les aider dans leurs démarches ?
- Quels résultats obtiennent-ils lorsqu’ils se retrouvent devant la Cour des petites créances ?
En plus d’entreprendre des recherches classiques pour identifier les règles juridiques attachées à la fois au fonctionnement des Cours des petites créances et au domaine de la construction, cette étude repose sur une analyse empirique de la jurisprudence de la Cour des petites créances du Québec. En étudiant plus avant les comptes rendus des jugements de cette cour traitant des litiges de construction durant une année (en l’espèce, l’année 2011), des constats et des pistes de réflexion ont été dégagés qui permettent de mieux appréhender le comportement des consommateurs et les obstacles qu’ils rencontrent.
Si toutes les provinces canadiennes inscrivent leur Cour des petites créances dans le cadre des mesures prises pour garantir un meilleur accès à la justice, force est de constater que tous les volets de ce grand débat ne sont pas pris en compte : alors que la question de l’accessibilité au système judiciaire est abordée à travers les règles procédurales qui régissent ces cours et les efforts entrepris pour transmettre et vulgariser l’information qui s’y rattache, la réflexion sur l’accès au droit est beaucoup moins bien traitée. Les principales règles que les consommateurs peuvent être amenés à mobiliser, au premier rang desquelles les lois de protection des consommateurs, demeurent d’application complexe ; l’absence de régime harmonisé impose en outre de recouper plusieurs corpus pour obtenir un portrait complet des droits reconnus aux consommateurs. Une situation qui entrave la capacité de ces derniers à agir seuls pour préparer et défendre leur cause.
Cette situation est d’autant plus regrettable que dans les litiges qui nous occupent, il existe une asymétrie de fait entre les parties au conflit : l’expertise de l’entrepreneur ou du prestataire de service. À cette inégalité s’en ajoute souvent une autre qui concerne les moyens financiers. D’une part, face à la compétence présumée du professionnel, le consommateur pourra avoir des difficultés à faire valoir ses récriminations sans le soutien d’un expert externe, une ressource souvent dispendieuse ; d’autre part, avec des moyens financiers plus importants, certains professionnels pourront aisément s’offrir les services d’un juriste ou d’un avocat pour préparer ou défendre leur cause, un luxe que les consommateurs n’ont pas toujours les moyens de s’offrir. L’étude du droit applicable a également conduit à constater une autre inégalité imputable à la nature des contrats qui lient consommateur et entrepreneur : la charge de la preuve qui pèse sur le consommateur est souvent plus lourde que celle prise en charge par l’autre partie.
Les résultats de l’analyse de la jurisprudence de la Cour des petites créances québécoise ont renforcé ce sentiment d’inégalité entre les parties, défavorable au consommateur, en plus d’apporter d’autres éléments de réflexion particulièrement intéressants concernant notamment :
- le poids des éléments de preuve apportés en cour ;
- la comparaison des stratégies adoptées par les parties ;
- les fondements juridiques des décisions ;
- les motifs d’échec des consommateurs ;
- etc.
Évidemment, toute méthodologie de recherche a ses limites et certaines des pistes soulevées méritent d’être approfondies pour enrichir la collecte d’informations et affiner l’analyse. Cela n’empêche pas l’ACQC de formuler des recommandations à l’issue de cette étude en vue de palier certaines lacunes observées et de garantir une meilleure protection des consommateurs :
- l’association encourage notamment les gouvernements provinciaux à poursuivre leurs efforts pour garantir un meilleur accès à la justice en adoptant les meilleures pratiques identifiées à l’échelle nationale concernant l’accessibilité aux Cours des petites créances et en s’investissant davantage à offrir un meilleur accès au droit, en particulier aux règles de protection des consommateurs ;
- l’association souhaite vivement que le gouvernement québécois prenne toute la mesure de l’inadéquation du droit de la consommation aux litiges de construction, imputable en partie à la formulation compliquée et inachevée de la Loi sur la protection des consommateurs, et qu’il prenne les engagements nécessaires pour remédier à cette situation.